Circulaire n°02-026 du 1er février 2002
actualisant la circulaire n°91-051 du 6 mars 1991
B.O.E.N. 14 février 2002
La loi d’orientation sur l’éducation (n° 89-486 du 10 juillet 1989 codifiée au sein du code de l’éducation, art. 511-2) a établi le principe de la liberté d’expression des élèves, notamment dans les lycées et les établissements régionaux d’enseignement adapté (en ce qui concerne les élèves de niveau d’études correspondant).
Le décret en Conseil d’État n° 91-173 du 18 février 1991 relatif aux droits et obligations des lycéens qui a modifie le décret n° 85-924 du 30 août 1985 modifié relatif aux établissements publics locaux d’enseignement, a défini les conditions dans lesquelles les lycéens peuvent, sous leur responsabilité, rédiger et diffuser des publications dans l’établissement (article premier).
Actualisée en prenant en compte les dix années d’expérience du droit de publication, la présente circulaire précise les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le régime des responsabilités qui y est attaché. Elle complète la circulaire relative aux droits et obligations des élèves (n° 91-052 du 6 mars 1991).
I. Le droit de publication des lycéens
Aux termes de l’article 3-4 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 modifié (article premier du décret du 18 février 1991) « Les publications rédigées par les lycéens peuvent être librement diffusées dans l’établissement. »
Conformément à la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, cette liberté s’exerce sans autorisation ni contrôle préalable et dans le respect du pluralisme ; ainsi plusieurs publications peuvent coexister dans le même établissement si les élèves le souhaitent.
L’exercice de la liberté d’expression peut être individuel ou collectif, cet exercice n’exigeant pas la constitution préalable d’une structure juridique, de type associatif notamment.
Il serait toutefois dangereux de laisser croire aux lycéens que leur capacité d’action en ce domaine ne connaît pas de limites et qu’ils ne risquent pas de voir mettre en cause leur responsabilité. Il faut souligner au contraire que les conditions d’exercice du droit de publication sont très précisément réglementées et qu’a été corrélativement mis en place tout un éventail de sanctions civiles et pénales à la mesure de la liberté d’expression reconnue par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 modifiée.
I.a. Les règles à respecter
Les lycéens devront être sensibilisés au fait que l’exercice de ces droits entraîne corrélativement l’application et le respect d’un certain nombre de règles dont l’ensemble correspond à la déontologie de la presse :
– La responsabilité personnelle des rédacteurs est engagée pour tous leurs écrits quels qu’ils soient, même anonymes ;
– Ces écrits (tracts, affiches, journaux, revues…) ne doivent porter atteinte ni aux droits d’autrui, ni à l’ordre public ;
– Quelle qu’en soit la forme, ils ne doivent être ni injurieux, ni diffamatoires, ni porter atteinte au respect de la vie privée. En particulier, les rédacteurs doivent s’interdire la calomnie et le mensonge. La loi sur la presse qualifie d’injurieux l’écrit qui comporte des expressions outrageantes mais qui ne contient pas l’imputation d’un fait précis ; elle qualifie de diffamatoire toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé.
– Le droit de réponse de toute personne mise en cause, directement ou indirectement, doit toujours être assuré à sa demande.
– Les lycéens s’interdisent tout prosélytisme politique, religieux ou commercial, sans pour autant s’interdire d’exprimer des opinions.
I.b. Les responsabilités encourues
Les lycéens doivent être conscients que, quel que soit le type de publication adopté, leur responsabilité est pleinement engagée devant les tribunaux tant sur le plan pénal que sur le plan civil. Dans le cas des élèves mineurs non émancipés, la responsabilité est transférée aux parents.
I.c. Le rôle des chefs d’établissement
Ces principes ainsi posés, le chef d’établissement ne saurait pour autant se désintéresser des publications rédigées par les lycéens.
Tout d’abord, il conserve à cet égard un pouvoir essentiel d’appui, d’encouragement ou, à l’inverse, de mise en garde, qui peut faire de lui un conseiller très écouté des élèves. On quitte ici le domaine de l’instruction et de la réglementation génératrices de responsabilité juridique pour celui de la concertation et de la discussion confiantes, essentiel pour le bon fonctionnement de l’établissement et la qualité des relations entre enseignants et élèves. Il est important que les lycéens désireux de créer une publication puissent, s’ils le souhaitent, être guidés dans leur entreprise par des responsables de l’établissement.
Par ailleurs, dans les cas graves prévus par l’article 3-4 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 modifié (article premier du décret du 18 février 1991) le chef d’établissement est fondé à suspendre ou interdire la diffusion de la publication dans l’établissement. Il doit notamment prendre en compte les effets sur les conditions de vie et de fonctionnement du service public d’éducation à l’intérieur des établissements scolaires, des faits incriminés. Lorsque la décision de suspension ou d’interdiction de la diffusion de la publication en cause est prise, il en informe par écrit le responsable de cette publication en précisant les motifs de sa décision ainsi que la durée pour laquelle elle est prononcée. L’information du conseil d’administration à laquelle il est tenu peut lui permettre de susciter un débat de nature à éclairer ces décisions et les suites qu’elles appellent.
Réglementairement tenu d’informer le conseil d’administration, le chef d’établissement met cette question à l’ordre du jour de la prochaine réunion du conseil, ce qui lui permet de susciter un débat de nature à éclairer sa décision et les suites qu’elle appelle. Il paraît important, compte tenu de ses compétences, que cette question soit évoquée lors de la réunion du conseil des délégués pour la vie lycéenne préalable à celle du conseil d’administration.
II. Les types de publications susceptibles d’être réalisées et diffusées
Les lycéens peuvent choisir, dans le respect des principes rappelés ci-dessus, entre deux types de publications :
II.a. Les publications de presse au sens de la loi du 29 juillet 1881.
Les lycéens qui le souhaitent peuvent se placer sous ce statut, relativement contraignant.
Il implique, en effet, le respect d’un certain nombre de règles et de formalités, telles que la désignation d’un directeur de la publication, qui doit être majeur, une déclaration faite auprès du procureur de la République concernant notamment le titre du journal et son mode de publication, et le dépôt officiel de deux exemplaires à chaque publication.
II.b. Les publications internes à l’établissement ne s’inscrivant pas dans le cadre de la loi de 1881.
Ces publications ne peuvent pas être diffusées à l’extérieur de l’établissement.
Dans ce cas, les lycéens ne sont pas assujettis à l’ensemble des dispositions relatives aux publications de presse. Ils doivent seulement indiquer au chef d’établissement le nom du responsable de la publication et, le cas échéant, le nom de l’association sous l’égide de laquelle cette publication est éditée.
Le responsable de la publication peut être un élève majeur ou mineur. Dans ce dernier cas, il devra bénéficier de l’autorisation de ses parents dont la responsabilité est susceptible d’être engagée.
Enfin, conformément à la circulaire n° 2001-184 du 26 septembre 2001, le fonds de la vie lycéenne peut contribuer au financement des publications internes réalisées par des élèves.
II.c. Conservation des publications réalisées par les élèves
Les publications scolaires doivent faire l’objet d’un « dépôt pédagogique » auprès du CLEMI (Centre de Liaison de l’Enseignement et des Moyens d’Information) dans les conditions prévues par la circulaire n° 2002-025 du 1er février 2002.
III. La formation des lycéens
La reconnaissance du droit à l’expression écrite des élèves s’accompagnera d’un dispositif de formation.
Le recteur veillera à ce que des stages répondant à ces objectifs soient inscrits au programme académique de formation.
Il s’agira d’apporter non seulement les connaissances propres à cet outil spécifique de communication qu’est la presse, mais encore d’aborder les notions juridiques de base qui s’appliquent à ce domaine.
Les correspondants du Centre de Liaison de l’Enseignement et des Moyens d’Information (CLEMI) pourront intervenir dans ces formations, de même que les représentants des associations agréées en vertu du décret n° 90-020 du 13 juillet 1990 (décret relatif aux relations du ministère chargé de l’éducation nationale avec les associations qui prolongent l’action de l’enseignement public) et tout professionnel – journaliste, éditeur, libraire, spécialiste du droit de l’information – susceptible d’enrichir le stage de sa compétence.
Les formations pourront être envisagées sous des formes variées s’adressant directement aux élèves, notamment dans le cadre des formations des délégués des élèves, ou s’adressant aux enseignants au travers de stages qui pourraient être mixtes enseignants-élèves.
En complément de sa participation à la formation, le CLEMI remplira, dans le cadre de son statut, une mission de conseil auprès de tous les acteurs de la communauté scolaire (chefs d’établissement, personnels d’éducation, élèves) ainsi qu’une mission de « centre de ressources et d’observatoire ».
De plus amples renseignements sur l’action du CLEMI sont disponibles sur son site Internet : www.clemi.org.
Le recteur et l’inspecteur d’académie sont tenus informés par le chef d’établissement des difficultés qui peuvent être rencontrées dans l’application de la présente circulaire, ainsi que des expériences dont la diffusion peut faciliter sa mise en œuvre.